Quels sont les travaux votés à la double majorité absolue ?
⚖️ Les décisions relevant de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 requièrent une double majorité : celle de tous les copropriétaires (majorité en nombre) représentant au moins les deux tiers des voix (majorité en voix).
Cette majorité se calcule donc d'abord en fonction du nombre de tous les copropriétaires, qu'ils soient ou non présents à l'assemblée. Elle n'est acquise que si plus de la moitié des copropriétaires a voté la résolution.
1️⃣ Décisions portant sur l’acquisition et l’aliénation de l’immeuble
La double majorité est requise en cas d'acquisition, de vente ou d'échange mais elle peut également fréquemment trouver à s'appliquer en cas d'appropriation des parties communes.
A été jugé comme relevant de la double majorité :
la construction d'une véranda sur une partie commune à jouissance exclusive, dès lors qu'elle n'est pas facilement démontable (Cass. 3e civ., 8 nov. 2006, n° 05-19.757)
la cession à la commune de la voirie et des réseaux d'une copropriété horizontale puisque les copropriétaires en conservent l'usage (CA Caen, 1rech. civ., 22 mai 2018, n° 16/01261)
la création d'un escalier partant du balcon d'un copropriétaire mais rejoignant une allée commune sur laquelle il réalise une emprise (Cass. 3e civ., 6 mai 2014, n° 13-14.057)
des travaux d'agrandissement nécessitant l'utilisation au moins partielle du coefficient d'utilisation des sols (COS) puisque l'acte a pour conséquence de priver le syndicat de la possibilité de construire ultérieurement et constitue à ce titre un acte d'appropriation d'un droit accessoire aux parties communes (Cass. 3e civ., 1er oct. 2013, n° 12-21.785)
la cession d'une parcelle peu étendue, séparée de l'ensemble immobilier par une route et frappée d'une servitude non aedificandi (Cass. 3e civ., 25 mai 1982, n° 80-16.917)
la réduction de la superficie de couloirs, paliers et portes d'accès (Cass. 3e civ., 23 nov. 1994, n° 92-21.367)
la vente d'un local à usage de buanderie commune pour permettre l'acquisition d'une pièce destinée à agrandir la conciergerie (Cass. 3e civ., 2 mai 1978)
la cession de paliers et d'une volée de marches provoquant une légère diminution d'ensoleillement (Cass. 3e civ., 26 mars 2008, n° 06-20.913)
la cession des combles à certains copropriétaires et la suppression des conduits de cheminée inutilisés au niveau de ces combles et des appartements (CA Paris, 23e ch. B, 14 déc. 1992)
l'attribution à un copropriétaire de la jouissance exclusive d'une partie commune, même si la cession a lieu à titre gratuit (CA Paris, 23e ch., 14 déc. 1992)
l'aménagement d'une terrasse sur une toiture avec percement de la façade, car les travaux aboutiront à une emprise sur les parties communes dans la mesure où seul les propriétaires du lot y auront accès et pourront en profiter (CA Lyon, 1re ch. civ., sect. B, 12 juill. 2011, n° 10/00553)
le fait pour un copropriétaire d'avancer la porte d'entrée de son appartement au droit du palier afin de réunir tous les locaux dont il est copropriétaire et d'en faire un seul appartement (CA Paris, 23e ch. B, 15 mars 1989)
la surélévation ou construction en vue de créer de nouveaux locaux privatifs : la loi ALUR soumet ce vote à la double majorité au lieu de l'unanimité auparavant applicable
2️⃣ Décisions portant sur la modification du règlement de copropriété
Elles doivent être prises à la double majorité de l’article 26 les décisions suivantes :
permettre le stationnement des véhicules dans la cour de l'immeuble (CA Paris, 20 oct. 1970)
réserver des places de parking aux visiteurs extérieurs à la copropriété (CA Aix-en-Provence, 4e ch., sect. A, 30 juin 2011, n° 09/12885)
d'autoriser l'occupation de parties communes alors que le règlement prévoit l'interdiction de les encombrer ou de les utiliser pour un usage personnel (CA Chambéry, 18 janv. 2011, n° 09/02770)
de l'installation d'une véranda par un copropriétaire sur un jardin commun à usage privatif (Cass. 3e civ., 20 mars 2002, n° 00-17.751)
de modifier le droit de construire du copropriétaire d'un lot transitoire pour l'étendre à d'autres activités que celles prévues (Cass. 3e civ., 30 nov. 2010, n° 09-72.386)
de loger le gardien de l'immeuble dans un local jusqu'alors affecté au garage des vélos et voitures d'enfants (CA Paris, 23e ch. B, 10 mars 1988)
de définir les conditions dans lesquelles, dans le silence du règlement, un couloir commun sera utilisé (Cass. 3e civ., 31 janv. 1984, n° 82-15.698)
de réserver une partie d'un couloir à usage commun, à l'usage exclusif d'un copropriétaire (Cass. 3e civ., 18 juill. 1986, n° 84-17.798)
d'autoriser la mise en place d'étalages extérieurs au droit de chaque lot pendant les heures d'ouverture d'une galerie marchande dépendant d'un centre commercial (Cass. 3e civ., 9 juill. 1986, n° 85-13.563)
de donner à bail pour 23 mois non renouvelables, une loge de concierge devenue vacante, s'agissant d'une partie commune dont la sous-location est prohibée (CA Aix, 30 mars 1999)
d'organiser le stationnement des véhicules dans la cour de l'immeuble, réservant ce stationnement aux copropriétaires occupants disposant d'une voiture, moyennant un loyer de 75 € par emplacement et par mois au profit du syndicat, et révisable tous les 3 ans, cela constitue une modification apportée à la jouissance des parties communes trop importante pour être votée à la majorité simple mais est fondée sur des critères suffisamment objectifs pour être adoptée à la majorité qualifiée de l'article 26, donc sans nécessiter un accord unanime (CA Paris, 23e ch., sect. B, 27 janv. 2000)
3️⃣ Décisions relatives à l’état descriptif de division
La Cour de cassation a précisé que la mise en conformité de l'état descriptif de division avec l'article 71 A (devenu les articles 71-1 à 71-5 depuis le décret n° 2012-1462 du 26 décembre 2012) du décret du 14 octobre 1955 précité, lorsqu'elle ne constitue qu'une simple mesure technique par l'éclatement de lots composites en autant de nouveaux lots que de locaux distincts, peut être prise à la majorité de l'article 24.
Mais la double majorité de l'article 26 est nécessaire si la modification porte atteinte aux droits des autres copropriétaires en changeant le total de leurs quotes-parts des parties communes (Cass. 3e civ., 29 oct. 2003, n° 02-13.089).
4️⃣ Décisions relatives aux ouvertures des portes d’accès des immeubles
Depuis la loi ALUR, les travaux nécessaires à la préservation de la sécurité physique des occupants sont soumis à la majorité simple. La loi de 1965 ne fait plus référence à des travaux en vue de prévenir les atteintes aux personnes et aux biens.
Si parmi ces travaux, tels qu'ils sont visés par la loi ALUR, il est possible de considérer que la pose de systèmes de fermeture de l'immeuble peut être décidée, les modalités d'ouverture des portes d'accès à l'immeuble relèvent toujours de la double majorité depuis la loi relative à la prévention de la délinquance. L'assemblée n'est toutefois appelée à délibérer sur les modalités d'ouverture de l'immeuble que pour autant que l'immeuble est équipé d'un dispositif permettant une fermeture totale, c'est-à-dire d'un dispositif de verrouillage permanent empêchant le libre accès.
5️⃣ Suppression du service de gardiennage / conciergerie et vente du logement de la concierge
La loi ALUR réécrit les dispositions relatives à la suppression du poste de concierge et à la cession de la loge sans remettre en cause son équilibre général. Si la suppression du poste de concierge ou de gardien et l'aliénation du logement qui lui est affecté lorsqu'il appartient au syndicat continue d'être soumise en principe à la double majorité, il est désormais prévu que les deux questions doivent être inscrites à l'ordre du jour de la même assemblée générale.
La suppression du poste de concierge ou de gardien peut donc être votée à la double majorité quand le règlement prévoit que « le service de l'immeuble est assuré par un concierge si le syndicat en décide ainsi ». Dans cette hypothèse, en effet, le service n'est que facultatif et sa suppression ne porte donc pas atteinte à la destination de l'immeuble ou aux modalités de jouissance de ses parties privatives (Cass. 3e civ., 24 sept. 2008, n° 07-17.039).
Sur la vente du logement de la gardienne, deux cas peuvent se présenter. Soit le logement constitue déjà un lot de copropriété, soit il est rangé dans les parties communes de l'immeuble. Dans cette dernière hypothèse, la transformation en lot s'avère nécessaire avant de procéder à la vente dès lors que la détermination des parties communes afférentes au bien constitue un élément essentiel de la convention (Cass. 3e civ., 11 févr. 2009, n° 07-20.237). Les tantièmes de charges seront modifiés à la majorité qualifiée de l'article 26 (L. n° 65-557, 10 juill. 1965, art. 11). Il en sera de même des quotes-parts de parties communes même si cela semble heurter le principe de leur intangibilité (CA Paris, 23e ch., sect. A, 24 sept. 1997, n° 95-28467).
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